Comment Montaigne écrivait ses Essais : l’Exemplaire de Bordeaux | Le blog de Gallica

(Reporté depuis Lettrures le 22 août 2021)

Les manuscrits de la main de Montaigne ne sont pas très nombreux. C’est pourquoi l’existence d’une édition des Essais abondamment annotée par son auteur revêt un caractère si exceptionnel. À la fois imprimé et manuscrit, désigné sous le nom d’Exemplaire de Bordeaux (EB), ce document est la seule trace qui nous reste de l’activité d’élaboration de l’œuvre de Montaigne.

Source : Comment Montaigne écrivait ses Essais : l’Exemplaire de Bordeaux | Le blog de Gallica

Sebald (Austerlitz): parole, mémoire, écriture, langue

mrg | lettrure(s)

Austerlitz (traduction Patrick Charbonneau, Actes Sud, 2002)

parole

p. 18. J’ai d’emblée été étonné de la façon dont Austerlitz élaborait ses pensées en parlant, de voir comment à partir d’éléments en quelque sorte épars il parvenait à développer les phrases les plus équilibrées, comment, en transmettant oralement ses savoirs, il développait pas à pas une sorte de métaphysique de l’histoire et redonnait vie à la matière du souvenir.

mémoire

pp. 30/1. Même maintenant où je m’efforce de me souvenir, où j’ai repris le plan en forme de crabe de Breendonk et lis en légende les mots anciens bureau, imprimerie, baraquements, salle Jacques-Ochs, cachot, morgue, chambre des reliques et musée, l’obscurité ne se dissipe pas, elle ne fait que s’épaissir davantage si je songe combien peu nous sommes capables de retenir, si je songe à tout ce qui sombre dans l’oubli chaque fois qu’une vie s’éteint, si je songe que le…

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Sebald (Austerlitz): parole, mémoire, écriture, langue

(Reporté depuis Lettrures le 22 août 2021)

Austerlitz (traduction Patrick Charbonneau, Actes Sud, 2002)

parole

p. 18. J’ai d’emblée été étonné de la façon dont Austerlitz élaborait ses pensées en parlant, de voir comment à partir d’éléments en quelque sorte épars il parvenait à développer les phrases les plus équilibrées, comment, en transmettant oralement ses savoirs, il développait pas à pas une sorte de métaphysique de l’histoire et redonnait vie à la matière du souvenir.

mémoire

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Borges, sur la lecture et l’écriture (suite)

(Reporté depuis Lettrures le 22 août 2021)

Prologue à la première édition de la Historia Universal de la Infamia (1935):

Leer, por lo pronto, es una actividad posterior a la de escribir: más resignada, más civil, más intelectual.

Ce que Roger Caillois traduit en:

Lire est, d’abord, un acte postérieur à celui d’écrire; plus résigné, plus courtois, plus intellectuel.

Un peu plus haut dans ce court prologue:

A veces creo que los buenos lectores son cisnes aun más tenebrosos y singulares que los buenos autores.

Soit dans le français de Caillois:

Je pense parfois que les bons lecteurs sont des oiseaux rares encore plus ténébreux et singuliers que les bons auteurs.

Borges: « Que d’autres se flattent des livres qu’ils ont écrits… »

(Reporté depuis Lettrures le 22 août 2021)

Après quelques tribulations, j’ai enfin pu sourcer cette citation qu’on trouve un peu partout sur le web francophone, non sourcée:

Que d’autres se flattent des livres qu’ils ont écrits moi je suis fier de ceux que j’ai lus !

Ce sont les deux premiers vers de « Un lector », l’avant dernier poème d’« Elogio della sombra » (qui est aussi le titre d’un court chef-d’oeuvre de Junichiro Tanizaki), un recueil de 1969:

Que otros se jacten de las páginas que han escrito;
a mí me enorgullecen las que he leído

Copistes (3:Orhan Pamuk)

« Ceux qui remarquent avec surprise que, dans les pays musulmans, les rayons des bibliothèques sont remplis de livres où foisonnent les commentaires et les annotations manuscrits devraient, au lieu de s’étonner, lancer un coup d’oeil aux multitudes d’hommes briséés que l’on croise dans les rues. « 

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Copistes (2: Ibn Arabî)

« Je lus un livre. (…) Puis je me retrouvai en train d’étudier les chiffres et les lettres du livre et je compris grâce à la calligraphie que le texte avait été écrit par le fils du cheik Abdurrahman, cadi de la ville d’Alep. Quand je repris mes esprits, je me trouvai en train d’écrire le chapitre que vous êtes en train de lire. Et je compris soudain que le chapitre écrit par le fils du cheik et le chapitre que j’avais lu en état de transe étaient les mêmes que le chapitre du livre que je suis en train d’écrire. »

Ibn Arabî, Futûthat al-Mekkiya, cité par Orhan Pamuk, La Vie nouvelle (trad. M. Andac, Gallimard, 1999, p. 389).

Copistes (1: Byzance)

A Byzance,

« le copiste doit être considéré comme un lecteur, voire comme l’unique véritable lecteur du texte, puisque la seule lecture qui amène à une pleine compréhension du texte est l’acte de copie. »

Luciano Canfora (Il Copista come autore, Palerme, 2002), cité par Guglielmo Cavallo dans Lire à Byzance, Paris: Les Belles Lettres, 2006 (p. 76). Lire la suite

Commentaire sur Voix Haute (Léo et Léa)

Pour mémoire après le saut un long commentaire sur l’article « Léo et Lea » du blogue « Voix Haute » (pour mémoire et parce que le thème a déjà été abordé plusieurs fois ici et que je ne vois pas comment envoyer des trackbacks depuis Blogger).

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Quintilien sur l’orthographe

Institutions Oratoires, 1, 4, 7-9 (cité par Roy Harris dans Rethinking Writing (2000)):

Il appartient à tous les grammairiens[1] de s’occuper de ces choses fines et d’examiner s’il ne nous manque pas certaines lettres nécessaires, non pour écrire des mots grecs (puisque nous avons emprunté deux lettres pour cela), mais pour les mots latins eux-mêmes: ainsi dans serus et uulgus le digamma éolien fait défaut[2], et il y a un son intermédiaire entre les lettres u et i (en effet nous ne disons pas optimum[3] comme opimum), et dans hereon n’entend clairement ni i, ni e; et par ailleurs d’autres lettres sont redondantes[4] (…)

(…) Aut grammatici saltem omnes in hanc descendent rerum tenuitatem, desintne aliquae nobis necessariae litterae, non cum Graeca scribimus (tum enim ab isdem duas mutuamur), sed proprie in Latinis: ut in his seruus et uulgus Aeolicum digammon desideratur, et medius est quidam u et i litterae sonus (non enim sic optimum dicimus ut opimum), et in here neque e plane neque i auditur; an rursus aliae redundent (…)[5]


  1. Grammatici, ie les professeurs de lettres
  2. pour distinguer la semi-consonne de la voyelle u, ce que fait la typographie moderne du latin, en notant la semi-consonne par v.
  3. écrit parfois optumum
  4. comme le q ou le x
  5. in The Latin Library trad. anglaise sur Lacus Curtius et Iowa State