Benny Lévy sur Husserl

in: Le Livre et les livres, p. 56:

Le programme lévinassien que reprend Alain est une relève du dernier grand programme pour l’Europe – celui de Husserl, au moment de la montée du nazisme. Husserl avait défini la tâche métaphysique de l’Europe et c’est poignant de relire ces textes, tant ils ont été à l’évidence démentis par les faits, par l’ampleur de ce qui s’est révélé à partir de la catastrophe de la dernière guerre. C’était un très grand programme: défendre l’Europe, c’est défendre la raison, et il fallait donc redonner toute sa vigueur au rationalisme. (…) La question est la suivante: que ce programme puisse formellement consister, je n’en disconviens pas mais est-ce que ce programme résiste à l’érosion décrite avec tellement de talent par Alain Finkielkraut?

[En complément aux billets de janvier (billet citation). Benny Lévy semble partager le point de vue de Gérard Granel, avec un angle un peu différent, moins heideggerien. Je ne partage pas leur point de vue: je prends le texte de Husserl comme un testament, non comme un programme. En 1936, lorsque Husserl écrit la Krisis, le régime anti-sémite nazi est déjà au pouvoir et Husserl a été chassé de l’Université, la catastrophe a déjà commencé. Je prends le « programme » de Husserl comme un essai de faire passer quelque chose à travers la catastrophe, un message que nous avons à recevoir. Je n’oublie pas que j’avais promis à Christian de répondre aux questions qu’il posait en commentaire à l’un de ces billets mais je ne suis pas sûr de comprendre assez Husserl pour m’y risquer aujourd’hui, j’y travaille.]

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Lévinas

A force d’écouter les émissions Lévinas de cette semaine, je commence enfin à entrevoir une compréhension. L’exigence éthique « infinie » ou « excessive » qu’il pose au fondement du moi est d’essence plus phénoménologique qu’éthique en elle-même. Lévinas dans ce sens est descriptif, non prescriptif. La pensée parente en ce sens ne serait pas du côté de Heidegger ou de Husserl mais du côté de Freud lu par Lacan.
« La subjectivité comme telle est initialement otage. »
La très grande prudence de Lévinas à l’égard du mot « Dieu » le rend ambigu.
L’exigence éthique « excessive » (« excessif » à prendre initialement sans valeur axiologique): Jankelevitch, Lévinas, Derrida. J’y voyais une crise d’un judaïsme laïcisé, d’un judaïsme athée. Mais à la différence des deux autres, Lévinas ne rompt pas avec la religion. Il est sur le fil (de ce point de vue je pourrais peut-être « racheter » Derrida à partir de Lévinas).
Risque de pharisianisme et de narcissisme moral. Ce que j’aperçois c’est par où Lévinas pourrait échapper à ce risque.
Athènes et Jérusalem.