The Wealth of Networks : How Social Production Transforms Markets and Freedom / Yochai Benkler.- New Haven and London: Yale University Press, 2006.
Aujourd’hui parler de la « révolution Internet » semble daté. Dans certains cercles académiques, c’est carrément naïf. Mais ça ne devrait pas l’être. Le changement apporté par l’environnement de l’information en réseaux est profond. Il est structurel. Il touche les fondements de la co-évolution des marchés libéraux et des démocraties libérales depuis presque deux siècles.
Une série de changements dans les technologies, l’organisation économique et les pratiques sociales de production dans cet environnement a créé de nouvelles opportunités pour la façon dont nous produisons et échangeons l’information, la connaissance et la culture. Ces changements ont accru le rôle de la production non marchande (nonmarket) et non propriétaire, à la fois par des individus isolés et par les efforts coopératifs dans une large gamme de collaborations plus ou moins étroitement tissées. Ces pratiques nouvellement apparues ont connus de remarquables succès dans des domaines aussi divers que la conception logicielle et le reportage d’investigation, la vidéo d’avant-garde et les jeux participatifs en ligne. Ensemble, ils pointent vers l’émergence d’un nouvelle environnement informationnel, un environnement où les individus sont libres de prendre une part plus active qu’il n’était possible dans l’économie industrielle de l’information du 20e siècle. Cette nouvelle liberté contient une grande promesse concrète: en tant que dimension de la liberté individuelle; en tant que plate-forme pour une meilleure participation démocratique; en tant que medium pour fonder une culture plus critique et auto-réflexive; et, dans une économie globale dépendant de plus en plus de l’information, en tant que mécanisme assurant partout l’amélioration du développement humain.
Cependant la croissance d’un cadre plus large pour la production d’information et de culture non-marchande, individuelle et coopérative, menace les détenteurs de l’économie industrielle de l’information. Au début du 21e siècle, nous nous trouvons au milieu d’une bataille autour de l’écologie institutionnelle de l’environnement numérique. Un large spectre de lois et d’institutions – depuis les télécommunications, le copyright ou les règles du commerce international jusqu’à des minuties comme les règles d’enregistrement des noms de domaines ou la question si les récepteurs télé seront légalement tenus de reconnaître tel code particulier – sont tirées à hue et à dia par les efforts pour faire pencher la terrain de jeu en faveur d’une manière de faire les choses ou d’une autre. La façon dont ces batailles tourneront dans la prochaine décade ou à peu près aura probablement un effet significatif sur la façon dont nous pourrons apprendre ce qui se passe dans le monde où nous vivons et sur la latitude que nous aurons – en tant qu’individus autonomes, en tant que citoyens et en tant que participants à des cultures et à des communautés – d’agir sur la façon dont nous voyons le monde tel qu’il est et tel qu’il devrait être.
(Ma traduction, après le saut la VO.)