(voir la citation de C.S. Lewis)
Petit livre (58 pages), de ceux qui se lisent facilement à l’occasion d’un déplacement à Paris ou à Marseille, consacré au fameux passage du Phèdre qui évoque les sources non rationnelles de la connaissance. 4 sources: la prophétie, la purification, la poésie et l’amour (éros).
L’original est en allemand (Begeisterung und göttlichen Wahnsinns), publié en 1963. L’auteur a écrit sur Thomas d’Aquin.
« un chrétien qui doit donner une interprétation philosophique de Platon ne saurait se dispenser (…) de mettre en jeu la vérité de sa foi. Et il est inutile d’épiloguer plus longuement sur le degré de son accord avec Platon quant au fait que l’inspiration révélatrice de Dieu fasse apparaître tout aussi bien les limites de la nature humaine que son ouverture infinie et son infinie puissance de réception. » (p. 26)
« la prophétie (…), entendue comme un évènement qui advient dans l’esprit de celui qui reçoit Révélation et Inspiration, est décrite par saint Thomas dans des catégories qui ne sont pas seulement celles de la passio, mais aussi celle de l’abandon. Il se demande, par exemple, si la prophétie est un habitus, c’est-à-dire quelque chose que le prophète possèderait comme un avoir, une dotation, un pouvoir. Il répond que ce n’est aucunement le cas, que la lumière prophétique est présente dans l’âme du prophète à la façon d’une affection ou d’une excitation passagère. » (p. 27)
« d’une façon tout à fait inattendue de la part d’un esprit aussi froidement rationnel, saint Thomas déclare que le prophète qui dort est plus apte à recevoir cette Révélation que celui qui est éveillé – ce qui, d’un seul coup, situe le docteur chrétien dans le même camp que Platon. Mais, pour un rationalisme qui falsifie le tout de la vie, leur position commune demeure incompréhensible et impossible à atteindre. » (p. 28)
En fonction de mes ruminations présentes, mon intérêt s’est plutôt attaché au premier axe de la « göttliche Wahnsinn » mais les 4 dimensions s’éclairent l’une l’autre (s’agissant de la purification (catharsis) Pieper évoque la psychanalyse (et, vu le contexte, je pense alors à Tobie Nathan)). S’agissant de la poésie, je songe à un billet récent de CJ qui me laisse un peu perplexe plus par son insistance que par son contenu avec lequel, si l’on excepte l’héroisation de Bill Gates, je ne suis pas en désaccord.
« Je ne crois pas à la littérature de ceux qui pensent sauver le monde, le racheter. » Est-ce à dire que la littérature (pour ce que ce mot signifie) n’a rien à voir avec la consistance du monde? Je ne me sens pas la force de discuter ici mais je remarque que les 4 dimensions de la folie divine exposés par Pieper selon Platon correspondent aux axes (la psychanalyse, la poésie et l’amour) de la protestation surréaliste contre le rationalisme et la littérature de leur temps, à condition, et ce n’est évidemment pas secondaire, d’en exclure la prophétie.
Pieper:
« nous sentirions-nous parfaitement justifiés à prétendre que la force d’émotion qui émane des grandes oeuvres serait absolument sans rapport avec l’ultime Fondement du monde (…)? » (p. 44)
J’essaie de te faire une première réponse. Mais il faudra que je revienne sur les textes que tu cites. Et que je retrouve ta longue et passionante citation d’Illich, à propos du rapport qu’il voit entre l’accomplissement du christianisme et l’ère de la technique.
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https://cercamon.wordpress.com/2006/05/10/lagora-hommage-de-illich-a-ellul/
+ lien (qui a sauté) vers ton billet
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