… des scientifiques qui ne furent plus intéressés par le résultat de leur recherche mais qui ont quitté leurs laboratoires et se sont précipités au-dehors pour prêcher à la multitude leurs nouvelles interprétations de la vie et du monde.
… scientists, who no longer were interested in the result of their research but left their laboratories and hurried off to preach to the multitude their new interpretations of life and world.
The Origins of Totalitarianism, II: « Imperialism », chap. 6: « Race thinking before Racism », p. 159
The tremendous power of persuasion inherent in the main ideologies of our times is not accidental. Persuasion is not possible without appeal to either experiences or desires, in other words to immediate political needs. Plausibility in these matters comes neither from scientific facts, as the various brands of Darwinists would like us to believe, nor from historical laws, as the historians pretend, in their efforts to discover the law according to which civilizations rise and fall. Every full-fledged ideology has been created, continued and improved as a political weapon and not as a theoretical doctrine. It is true that sometimes—and such is the case with racism—an ideology has changed its original political sense, but without immediate contact with political life none of them could be imagined. Their scientific aspect is secondary and arises first from the desire to provide watertight arguments, and second because their persuasive power also got hold of scientists, who no longer were interested in the result of their research but left their laboratories and hurried off to preach to the multitude their new interpretations of life and world. We owe it to these “scientific” preachers rather than to any scientific findings that today no single science is left into whose categorical system race-thinking has not deeply penetrated. This again has made historians, some of whom have been tempted to hold science responsible for race-thinking, mistake certain either philological or biological research results for causes instead of consequences of race-thinking.
Le terrible pouvoir de persuasion inhérent aux principales idéologies contemporaines n’est pas accidentel. La persuasion n’est pas possible sans un appel soit aux expériences soit aux désirs, en d’autres termes aux besoins politiques immédiats. La plausibilité dans ces matières ne vient ni des faits scientifiques, comme différentes sortes de darwinistes voudraient nous le faire croire, ni des lois historiques, comme le prétendent les historiens dans leurs efforts pour découvrir la loi selon laquelle les civilisations croissent et tombent. Toute idéologie entièrement telle a été créée, continuée et améliorée comme une arme politique et non comme une doctrine théorétique. Il est vrai que parfois – et tel est le cas avec le racisme – le sens politique d’une idéologie a changé mais sans contact immédiat avec la vie politique aucune d’entre elles ne pourrait être imaginée. Leurs aspects scientifiques sont secondaires et proviennent d’abord du désir de fournir des arguments indiscutables et ensuite parce que leur pouvoir de persuasion touche aussi des scientifiques qui ne furent plus intéressés par le résultat de leur recherche mais qui ont quitté leurs laboratoires et se sont précipités au-dehors pour prêcher à la multitude leurs nouvelles interprétations de la vie et du monde. Nous devons à ces prêcheurs « scientifiques » plutôt que quelques découvertes scientifiques le fait qu’aujourd’hui aucune science ne reste que ce système catégorique de pensée raciale n’ait profondément pénétré. Cela encore a conduit des historiens, d’entre lesquels certains ont été tentés de tenir la science responsable de la pensée raciale, à prendre certains résultats de recherche philologique ou biologique pour des causes au lieu de conséquences de la pensée raciale.
(Lu par Christiane Cohendy au cours du débat du cycle « Supramuros » de l’Université d’Avignon et des Pays du Vaucluse, juillet 2017[1])