Breton, Rimbaud, Gracq (Charleville et Nantes)

Dans ses Entretiens de 1952, André Breton se souvient:

A travers les rues de Nantes, Rimbaud me possède entièrement: ce qu’il a vu, tout à fait ailleurs, interfère avec ce que je vois et va même jusqu’à s’y substituer; à son propos, je ne suis plus jamais repassé par cette sorte d’«état second » depuis lors. L’assez long chemin qui me mène chaque après-midi, seul et à pied, de l’hôpital de la rue du Bocage au beau parc de Procé, m’ouvre toutes sortes d’échappées sur les sites mêmes des Illuminations: ici, la maison du général dans Enfance, là «ce pont de bois arqué », plus loin certains mouvements très insolites que Rimbaud a décrits: tout cela s’engouffrait dans une certaine boucle du petit cours d’eau bordant le parc qui ne faisait qu’un avec là «rivière de cassis ». Je ne peux donner une idée plus raisonnable de ces choses.

Julien Gracq, qui cite ce passage dans La Forme d’une ville (Corti, 1985), note :

l’aptitude particulière d’une ville à fournir indéfiniment, souplement, à l’imagination sollicitée par la poésie, des repères, des modèles et des chemins, à donner sur les visions les plus insolites presque naturellement, et sans avoir à être contrainte d’aucune manière.

(L’ « hôpital de la rue du Bocage » est le lycée Gabriel-Guist’hau, qui servit d’hôpital militaire pendant la 1ère guerre mondiale. C’est là qu’André Breton et Jacques Vaché se rencontrent en 1916 et fondent le mouvement surréaliste.)

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