Jean-Pierre Dupuy (2): catastrophe et justice

Mise à jour du billet de samedi dernier: Jean-Pierre Dupuy chez Garapon, ce matin, avec Frédéric Worms, « Mal moral, mal naturel : la justice face à la catastrophe ? » [perm.] Axé sur le problème de la responsabilité/culpabilité. Moins passionnant que celui de la semaine dernière mais qui la complète dans la direction que mes réflexions m’avaient fait prendre, celle de la configuration politico-morale (ici plutôt juridico-morale) où poser la question des catastrophes à venir.

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Jean-Pierre Dupuy: le catastrophisme éclairé

Jean-Pierre Dupuy (Pour un catastrophisme éclairé, Métaphysique des tsunamis, au Seuil) à l’instant sur FC. C’est très bien, ce qu’il dit, mais ça sent un peu le créneau.

Je résume ce que j’ai compris: il vient des sciences. Il choisit les sciences sociales puis la philosophie par indépendance de pensée (pour fonctionner dans les sciences, il faut admettre toutes une séries de propositions dont des propositions inacceptables – cf. Th. Kuhn). En tant que scientifique de formation, il va plutôt pratiquer une philosophie d’inspiration anglo-saxonne plutôt que la philosophie d’inspiration allemande comme les font les philosophes littéraires (soit l’essentiel des philosophes français). Il va travailler sur les paradoxes des catastrophes, en commençant par la logique de la dissuasion nucléaire, paradoxes qui sont des paradoxes du temps. Même en possession de certitudes objectives, on ne peut croire aux catastrophes annoncées (rupture trop radicale avec le cadre de conception du monde, donc du possible – je suppose; lorsqu’on rationalise cette impossibilité de croire, on met sa confiance dans la techno-science pour résoudre les conditions de la catastrophe future, le problème, c’est que les solutions de la technoscience créent de nouvelles conditions catastrophiques, ex. des nanosciences). Or il est nécessaire de penser selon l’horizon global des catastrophes (ex.: sectoriellement on va se préoccuper du renchérissement, c’est-à-dire de la raréfaction des ressources énergétiques fossiles, or selon l’horizon du réchauffement planétaire, pour éviter la catastrophe climatique, il faudrait n’utiliser qu’un tiers des ressources disponibles, selon cet horizon, donc, on n’est pas dans une logique de la rareté mais dans une logique de la surabondance, que l’économie ne connaît pas). Solution: inscrire la catastrophe comme nécessité, telle qu’on peut considérer qu’elle a déjà eu lieu, c’est à dire nous penser dans l’après-catastrophe, en quelque sorte inverser le temps (histoire de Noé qui prend le deuil de l’humanité qui ne veut pas croire au Déluge). De cette façon, il sera éventuellement possible de produire la prise de conscience qui permettrait d’éviter la catastrophe.

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