éducation (Camus, Milosz, Jaspers…)

Simon Leys, dans Le Studio de l’inutilité, rapporte:

[Camus] avait un jour consulté Milosz pour savoir s’il serait honnête pour un athée comme lui de laisser ses enfants faire leur première communion – Milosz s’était lui-même posé semblable question ; et, à l’origine il l’avait posée à Karl Jaspers. Ce dernier lui avait répondu que, en tant que protestant, il n’avait pas de sympathie particulière pour le catholicisme, mais il estimait que tous les enfants devraient être éduqués dans leur religion propre, ne fût-ce que pour avoir accès à la tradition biblique. À son tour, Milosz répondit à Camus à peu près de la même façon.

Pierre Bourdieu et le latin

Deux très intéressants billets de Philippe Cibois sur son carnet de recherche, « la question du latin »:

où il montre que si Bourdieu critique dans la Reproduction l’enseignement du latin comme dispositif de production de distinction, ça ne l’empêche pas de supposer à ces lecteurs une certaine connaissance de cette langue.

bien que Bourdieu dise que l’apprentissage des langues anciennes est un gaspillage ostentatoire (…), il suppose de fait une connaissance du latin pour être compris.

Le premier billet, où j’avais mis en commentaire cette citation d’Alain (Propos sur l’éducation):

Napoléon, je crois bien, a exprimé en deux mots ce que tout homme doit savoir le mieux possible : géométrie et latin.

m’a donné l’occasion d’un échange avec l’auteur (que je mets ici après le saut pour mémoire), où il ne s’agit pas de Bourdieu mais, à partir du cas du latin, des objectifs de l’éducation secondaire, une question qui m’intéresse dans la mesure où il me semble, depuis ma pratique de formation à la littératie informationnelle, que les nouvelles conditions de diffusion et d’accès à l’information, devraient amener à la reformuler radicalement (et l’on apercevrait alors peut-être certaines perspectives paradoxales).

En gros je tends à reprocher à Philippe Cibois de se laisser gagner par une conception de l’éducation qu’il critique pourtant chez Bourdieu et dont il montre que celui-ci, pratiquement, ne la suit pas.

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« Pouvoir et persuasion… » / Peter Brown (2. paideia)

(Un post qui était resté à l’état de brouillon depuis le mois de mai! Comme je ne sais pas quand j’aurais l’occasion de revenir sur livre de Peter Brown, je le poste tel quel.

Pouvoir et persuasion dans l’Antiquité tardive: vers un Empire chrétien / Peter Brown, trad. Pierre Chuvin.- Paris: Le Seuil, 1998 (1992)

Chap. 2: La paideia et le pouvoir.

« Vêtus d’une petite toge, les cheveux impeccablement coiffés », les garçons déclamaient sur des thèmes classiques. La rhétorique était considérée comme l’antichambre de la vie publique, à tel point que la classe de Libanius n’était séparée du conseil municipal que par un étroit couloir. Aux périodes de crise, les hurlements des notables désespérés servaient de fond sonore à son enseignement.

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« Pouvoir et persuasion dans l’Antiquité tardive » / Peter Brown (1992) + remarques sur 2 anciens tabous en histoire

Pouvoir et persuasion dans l’Antiquité tardive: vers un Empire chrétien / Peter Brown, trad. Pierre Chuvin.- Paris: Le Seuil, 1998 (1992)

Ma principale lecture autour du mois de mars dernier (j’avais envie de me faire plaisir). Il décrit comment au cours des 4e et 5e siècle de l’ère commune, la christianisation de l’Empire romain correspond à un changement de paradigme quant à la sociologie politique de l’ensemble impérial, particulièrement s’agissant des élites et des instruments culturels de leur sélection et de leur légitimation.

Je fais des extraits séparés de chaque chapitre par commodité même si les deux premiers chapitres sont étroitement liés, décrivant le paradigme de départ et ce qui le met en crise, les deux chapitres suivants décrivant le nouveau paradigme chrétien qui se met en place.

J’activerai les liens de la table des matières ci-dessous au fur et à mesure de la publication des extraits:

  1. La devotio: l’autocratie et les élites
  2. La paideia et le pouvoir
  3. Pauvreté et pouvoir
  4. Vers un Empire chrétien

Après le saut, quelques réflexions dilettantes concernant, à propos de Peter Brown, l’écriture de l’histoire et particulièrement 2 anciens tabous la concernant.
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